Sommaire
AUBAILE Françoise, BERNARD Mireille, PASQUET Patrick
Introduction: Pour une anthropologie de la viande : de l’environnement à la santé
MANUSSET Sandrine
Entre tradition et profession. Analyse intergénérationnelle et interculturelle de la pratique de la chasse à Saint-Georges de l’Oyapock (Guyane française)
SOLLY Hilary
Village hunters and city sellers. The bushmeat economy in the Dja Reserve (Cameroun)
KIYULU N’Yanga-Nzo, LUHUNU Kitsidikit
Impact de la chasse téké sur la conservation et l’utilisation de la faune sauvage de la réserve et domaine de chasse de Bombo-Lumene (République du Congo)
GRENAND Pierre, GRENAND Françoise
Le boucanage de la viande et du poisson. De la conservation à l’art culinaire dans les sociétés sud-amérindiennes
ROULON-DOKO Paulette
La tortue. Une nourriture d’homme et un plat de choix chez les Gbaya de Centrafrique
ABU-SHAMS Leila
Elaboration, presentation and consumption of slaughtered meat in the Arab World
PROST Michel
Éléments et pratiques de l’alimentation carnée dans les Alpes Dauphinoises (XIVe-XIXe siècles)
LABARRE Mathieu de
Quand la hiérarchie culinaire est bousculée. Le déclin des carnivores
CAZES VALETTE Geneviève
Structure, conjoncture et conjectures. La consommation de viande en France depuis la « crise de la vache folle »
LEPAGE Yvan, DELIGNE Jean
Habitudes alimentaires en Belgique selon les revenus des ménages
RABOUD-SCHÜLE Isabelle
La fermentation de la viande
PICON Bernard
Du Taureau de Camargue à l’AOC viande de Taureau de Camargue. L’incarnation d’un rapport fusionnel à la Nature
RIBÉREAU-GAYON Marie-Dominique
La viande qui soigne. Consommations cygénétiques et thérapies dans les Landes de Gascogne
PAGEZY Hélène
Gibiers, poissons ou chenilles ? Comment les Ntomba du Congo (ex-Zaïre) satisfont-ils en toute saison leurs besoins en protéines et leurs normes culturelles
ROVILLE-SAUSSE Françoise, SOSSAH Florès
Le fer dans l’alimentation des enfants d’origine subsaharienne. Enquête dans le Val-de-Marne
BERNARD Mireille
Consommation de viande et Santé
HEURTEBISE Hélène
Du bétail vivant à la viande. La médiation du maquignon
Sommaire
AUBAILE Françoise, BERNARD Mireille, PASQUET Patrick
Introduction: Pour une anthropologie de la viande : de l’environnement à la santé
MANUSSET Sandrine
Entre tradition et profession. Analyse intergénérationnelle et interculturelle de la pratique de la chasse à Saint-Georges de l’Oyapock (Guyane française)
SOLLY Hilary
Village hunters and city sellers. The bushmeat economy in the Dja Reserve (Cameroun)
KIYULU N’Yanga-Nzo, LUHUNU Kitsidikit
Impact de la chasse téké sur la conservation et l’utilisation de la faune sauvage de la réserve et domaine de chasse de Bombo-Lumene (République du Congo)
GRENAND Pierre, GRENAND Françoise
Le boucanage de la viande et du poisson. De la conservation à l’art culinaire dans les sociétés sud-amérindiennes
ROULON-DOKO Paulette
La tortue. Une nourriture d’homme et un plat de choix chez les Gbaya de Centrafrique
ABU-SHAMS Leila
Elaboration, presentation and consumption of slaughtered meat in the Arab World
PROST Michel
Éléments et pratiques de l’alimentation carnée dans les Alpes Dauphinoises (XIVe-XIXe siècles)
LABARRE Mathieu de
Quand la hiérarchie culinaire est bousculée. Le déclin des carnivores
CAZES VALETTE Geneviève
Structure, conjoncture et conjectures. La consommation de viande en France depuis la « crise de la vache folle »
LEPAGE Yvan, DELIGNE Jean
Habitudes alimentaires en Belgique selon les revenus des ménages
RABOUD-SCHÜLE Isabelle
La fermentation de la viande
PICON Bernard
Du Taureau de Camargue à l’AOC viande de Taureau de Camargue. L’incarnation d’un rapport fusionnel à la Nature
RIBÉREAU-GAYON Marie-Dominique
La viande qui soigne. Consommations cygénétiques et thérapies dans les Landes de Gascogne
PAGEZY Hélène
Gibiers, poissons ou chenilles ? Comment les Ntomba du Congo (ex-Zaïre) satisfont-ils en toute saison leurs besoins en protéines et leurs normes culturelles
ROVILLE-SAUSSE Françoise, SOSSAH Florès
Le fer dans l’alimentation des enfants d’origine subsaharienne. Enquête dans le Val-de-Marne
BERNARD Mireille
Consommation de viande et Santé
HEURTEBISE Hélène
Du bétail vivant à la viande. La médiation du maquignon
Introduction
Pour une anthropologie de la viande :
de l’environnement à la santé
La viande est un produit contrasté, à la fois « adoré » et « abhorré » qui focalise dans toutes les cultures nombre de pratiques et de croyances ; c’est notamment sur elle que portent la plupart des interdits alimentaires (Garine, 1989). La viande reste cependant la condition nécessaire à une alimentation équilibrée. Comme aliment, elle est tout à la fois une matière biologie, un bien économique et un sujet marqué culturellement et socialement par des pratiques et des représentations variables dans le temps et dans l’espace. En témoigne le débat, qui chez les scientifiques, se déroule en filigrane, dans la littérature anthropologique, autour des rôles respectifs de l’aliment carné et de l’aliment végétal dans l’évolution biologique et culturelle de notre espèce. Est-il par ailleurs, nécessaire de rappeler l’émotion suscitée dans nos sociétés par la récente « crise de la maladie de la vache folle » et les prises de position parfois extrêmes qui ont suivi.
Le présent ouvrage, où sont réunis des textes issus des réflexions d’ethnologues, anthropobiologistes, sociologues, historiens, est enrichi par quelques autres et se présente comme une première contribution à une éco-anthropologie de l’aliment carné où seraient mis en relation les facteurs de milieu, les aspects culturels et sociaux et les conséquences biologiques liées à la consommation de viande. Tout au long de ses pages, sont successivement abordés la problématique de l’acquisition des viandes de chasse, la description de certaines pratiques de transformation et de consommation de viande, l’analyse des représentations et des symboliques qui y sont liées et certains aspects des conséquences médico-diététiques qui en découlent.
En contexte traditionnel de populations d’agriculteurs-chasseurs ou chasseurs-collecteurs, la viande de chasse constitue un élément important des ressources alimentaires offertes par le milieu mais les évolutions économiques et démographiques actuelles l’ont souvent fait passer du statut de produit auto-consommé et culturellement valorisé à celui de produit de rente avec des conséquences sur l’environnement. Par ailleurs, la conservation, la transformation et la consommation des produits carnés disponibles sont l’objet de pratiques et savoirs précis et témoignent d’une ample variété culturelle et sociale. Ainsi le boucanage est, chez les Indiens Wayampi de Guyane, à la fois pratique de conservation et préparation culinaire.
Les représentations et les symboles liés à l’aliment carné sont aussi présents dans les sociétés dites traditionnelles que dans nos sociétés occidentales. Chez les Gbaya de Centrafrique, la tortue est chassée, préparée et consommée par les hommes seuls. Dans le cas du sacrifice musulman de l’Aïd el-Kebïr à Rabat, les modalités de mise à mort de l’animal, son partage et les préparations culinaires sont liés à des croyances spécifiques. La dimension diachronique est présente avec la description des variations de consommation de viande et l’évolution des pratiques qui y sont liées, dans les Alpes dauphinoises, du XIVe au XIXe siècle.
Dans les sociétés occidentales, la question de la consommation des produits carnés connaît un regain d’intérêt, en relation avec les changements dans leurs représentations et la remise en question de la prépondérance de la viande dans la hiérarchie du culinaire, laquelle ne date pas de la « crise de la vache folle ». Toutefois l’importance des facteurs socio-économiques dans la modification des comportements d’achat et de consommation de viande est soulignée à propos de la Belgique. Autre éclairage, l’exposition de la fermentation à l’Alimentarium de Vevey en 1998 a illustré l’ambivalence ressentie par le public de ce procédé appliqué aux produits carnés : s’il procure une nourriture, d’autre part il putréfie la chair.
En dépit d’une d’une dévalorisation de la viande dans le discours de nos sociétés, certaines viandes trouvent grâce aux yeux du consommateur moderne en raison de leur caractère « authentique », de leur origine identifiable : ce qu’illustre tout particulièrement la viande du taureau camarguais, classée en AOC. Un autre produit authentique, la viande de chasse dans les Landes, s’est maintenu par une tradition de consommation articulée par des représentations positives de la santé et de la nature.
C’est précisément la santé qui mobilise nombre de pratiques et de savoirs populaires autour de la consommation de viande et pas seulement dans nos sociétés, comme à propos de la « faim » de viande chez les Ntomba du Congo (ex Zaïre), terme qui exprime les difficultés ressenties à la période de soudure. De même les décalages culturels créés en situation d’immigration peuvent induire certaines carences alimentaires liées à la sous-consommation de produits carnés.
Quoi qu’il en soit, l’aliment carné se posera toujours en référent naturel, en tant que principal protagoniste alimentaire des premières étapes de l’évolution biologique de notre espèce dans un milieu aux ressources toujours plus dispersées. Car il est l’aliment de haute qualité par excellence, dense en énergie, riche en nutriments essentiels. En témoignent les progrès de l’agriculture orientés non seulement sur la productivité des végétaux mais sur l’amélioration de leurs qualités nutritionnelles et organoleptiques jusqu’à les faire ressembler toujours plus à des produits d’origine animale.
C’est ce que propose cet ouvrage qui se présente comme une première contribution à une éco-anthropologie de l’aliment carné où seraient mis en relation les facteurs de milieu, les aspects culturels et sociaux et les conséquences biologiques liées à la consommation de viande. Tout au long de ses pages, sont successivement abordés la problématique de l’acquisition des viandes de chasse et ses conséquences sur l’environnement, la description de certaines pratiques de transformation et de consommation de viande, l’analyse des représentations et des symboliques qui y sont liées et certains aspects des conséquences médico-diététiques qui en découlent.
Introduction
Pour une anthropologie de la viande :
de l’environnement à la santé
La viande est un produit contrasté, à la fois « adoré » et « abhorré » qui focalise dans toutes les cultures nombre de pratiques et de croyances ; c’est notamment sur elle que portent la plupart des interdits alimentaires (Garine, 1989). La viande reste cependant la condition nécessaire à une alimentation équilibrée. Comme aliment, elle est tout à la fois une matière biologie, un bien économique et un sujet marqué culturellement et socialement par des pratiques et des représentations variables dans le temps et dans l’espace. En témoigne le débat, qui chez les scientifiques, se déroule en filigrane, dans la littérature anthropologique, autour des rôles respectifs de l’aliment carné et de l’aliment végétal dans l’évolution biologique et culturelle de notre espèce. Est-il par ailleurs, nécessaire de rappeler l’émotion suscitée dans nos sociétés par la récente « crise de la maladie de la vache folle » et les prises de position parfois extrêmes qui ont suivi.
Le présent ouvrage, où sont réunis des textes issus des réflexions d’ethnologues, anthropobiologistes, sociologues, historiens, est enrichi par quelques autres et se présente comme une première contribution à une éco-anthropologie de l’aliment carné où seraient mis en relation les facteurs de milieu, les aspects culturels et sociaux et les conséquences biologiques liées à la consommation de viande. Tout au long de ses pages, sont successivement abordés la problématique de l’acquisition des viandes de chasse, la description de certaines pratiques de transformation et de consommation de viande, l’analyse des représentations et des symboliques qui y sont liées et certains aspects des conséquences médico-diététiques qui en découlent.
En contexte traditionnel de populations d’agriculteurs-chasseurs ou chasseurs-collecteurs, la viande de chasse constitue un élément important des ressources alimentaires offertes par le milieu mais les évolutions économiques et démographiques actuelles l’ont souvent fait passer du statut de produit auto-consommé et culturellement valorisé à celui de produit de rente avec des conséquences sur l’environnement. Par ailleurs, la conservation, la transformation et la consommation des produits carnés disponibles sont l’objet de pratiques et savoirs précis et témoignent d’une ample variété culturelle et sociale. Ainsi le boucanage est, chez les Indiens Wayampi de Guyane, à la fois pratique de conservation et préparation culinaire.
Les représentations et les symboles liés à l’aliment carné sont aussi présents dans les sociétés dites traditionnelles que dans nos sociétés occidentales. Chez les Gbaya de Centrafrique, la tortue est chassée, préparée et consommée par les hommes seuls. Dans le cas du sacrifice musulman de l’Aïd el-Kebïr à Rabat, les modalités de mise à mort de l’animal, son partage et les préparations culinaires sont liés à des croyances spécifiques. La dimension diachronique est présente avec la description des variations de consommation de viande et l’évolution des pratiques qui y sont liées, dans les Alpes dauphinoises, du XIVe au XIXe siècle.
Dans les sociétés occidentales, la question de la consommation des produits carnés connaît un regain d’intérêt, en relation avec les changements dans leurs représentations et la remise en question de la prépondérance de la viande dans la hiérarchie du culinaire, laquelle ne date pas de la « crise de la vache folle ». Toutefois l’importance des facteurs socio-économiques dans la modification des comportements d’achat et de consommation de viande est soulignée à propos de la Belgique. Autre éclairage, l’exposition de la fermentation à l’Alimentarium de Vevey en 1998 a illustré l’ambivalence ressentie par le public de ce procédé appliqué aux produits carnés : s’il procure une nourriture, d’autre part il putréfie la chair.
En dépit d’une d’une dévalorisation de la viande dans le discours de nos sociétés, certaines viandes trouvent grâce aux yeux du consommateur moderne en raison de leur caractère « authentique », de leur origine identifiable : ce qu’illustre tout particulièrement la viande du taureau camarguais, classée en AOC. Un autre produit authentique, la viande de chasse dans les Landes, s’est maintenu par une tradition de consommation articulée par des représentations positives de la santé et de la nature.
C’est précisément la santé qui mobilise nombre de pratiques et de savoirs populaires autour de la consommation de viande et pas seulement dans nos sociétés, comme à propos de la « faim » de viande chez les Ntomba du Congo (ex Zaïre), terme qui exprime les difficultés ressenties à la période de soudure. De même les décalages culturels créés en situation d’immigration peuvent induire certaines carences alimentaires liées à la sous-consommation de produits carnés.
Quoi qu’il en soit, l’aliment carné se posera toujours en référent naturel, en tant que principal protagoniste alimentaire des premières étapes de l’évolution biologique de notre espèce dans un milieu aux ressources toujours plus dispersées. Car il est l’aliment de haute qualité par excellence, dense en énergie, riche en nutriments essentiels. En témoignent les progrès de l’agriculture orientés non seulement sur la productivité des végétaux mais sur l’amélioration de leurs qualités nutritionnelles et organoleptiques jusqu’à les faire ressembler toujours plus à des produits d’origine animale.
C’est ce que propose cet ouvrage qui se présente comme une première contribution à une éco-anthropologie de l’aliment carné où seraient mis en relation les facteurs de milieu, les aspects culturels et sociaux et les conséquences biologiques liées à la consommation de viande. Tout au long de ses pages, sont successivement abordés la problématique de l’acquisition des viandes de chasse et ses conséquences sur l’environnement, la description de certaines pratiques de transformation et de consommation de viande, l’analyse des représentations et des symboliques qui y sont liées et certains aspects des conséquences médico-diététiques qui en découlent.